Interprétation de Mme D. Bourdier-Caduff

Pour réaliser un dépliant à déposer à l’entrée de l’église, à propos de celle-ci, j’ai demandé à Mme D. Bourdier-Caduff d’en écrire la trame.Elle s’est tellement passionné pour cette tâche qu’elle y a travaillé d’arrache-pied. Vous trouverez donc ici son travail, in extenso,et si vous n’êtes pas d’accord avec ses interprétations, cela suscitera au moins la discussion et la passion.

 

TARON SON EGLISE  ET SES MOSAIQUES ROMAINES

  1. HISTOIRE

          Dans le canton de Garlin, TARON est un petit village, au passé historique et archéologique très riche. Au 19 ème siècle, des fouilles mettent à jour la structure d’une villa d’une importante superficie et d’un ensemble de plusieurs mosaïques de belle qualité dont certaines sont exposées dans l’église. Au 10 ème siècle, avec la multiplication des paroisses, de nombreuses églises sont édifiées et l’église de l’Assomption de Taron, classée monument historique, est parmi les plus anciennes.
Construite sur les fondations d’une aile de la villa gallo-romaine, l’église actuelle est le résultat de nombreux remaniements effectués au fil des siècles  ( entre les 11 ème et 18 ème ) et son origine est incertaine. L’église primitive aurait peut-être été édifiée très tôt à l’époque romane, vers le 10 ème ou 11 ème siècle avec rajout au 12 ème, de la chapelle sud, l’actuelle sacristie, surmontée d’un clocher-tour. Cependant,certaines anomalies architecturales peuvent poser le problème de son antériorité à la nef. Il est donc également possible que la partie basse de la nef actuelle soit postérieure à cette chapelle du 12 ème.
Au 15 ème, l’église est largement reconstruite, avec surélévation et voûtement de la nef, établissement des contreforts extérieurs et reconstruction du chœur avec une abside à trois pans. Elle est également agrandie d’une chapelle au sud (D).
Au 16 ème, ( 1530 ), on rajoute une chapelle au nord dédiée à Sainte Catherine (E), puis le presbytère, attenant à l’église, au cours du 17 ème. Les dernières modifications importantes datent du 18 ème, avec la transformation du presbytère (1735), le rajout d’un corps de porche à l’ouest (1744-1747) et enfin, la surélévation et restauration du clocher-tour (1759-1762). La galerie, rajoutée au presbytère au 19 ème (1885-1886), semble être l’une des dernières transformations de Notre Dame de l’Assomption de Taron.

 

2   PLAN DE L’EGLISE

 

        L’église, selon la tradition liturgique, est orientée avec un chevet tourné vers l’est. De forme atypique, de part les ajouts successifs, le plan ne présente pas la forme de croix latine traditionnelle, mais garde la structure d’une nef unique,(A), prolongée à l’est par le cœur (B), et à l’ouest par le porche (F). L’adjonction plus tardive du presbytère, dans le prolongement de la chapelle (D), représente un ensemble assez conséquent (J,L,M,N,O) qui accentue encore l’irrégularité du plan global. Côté sud, présence inhabituelle d’un clocher-tour, traditionnellement situé à l’ouest.

 

                                     VISITE INTERIEURE


  1. LA NEF CENTRALE (A)   ( 11 ème ? 15 ème )

        Voûtée d’ogive en briques, avec 3 travées rectangulaires, deux travées de dimensions égales et d’une travée de chœur plus étroite. Les murs de la nef, rehaussés au 15 ème, sont réalisés uniformément en appareil de blocage ( galets disposés sans ordre, mais bloqués ensemble par des assises de pierres ou de briques ). On remarque également sur le côté nord, l’asymétrie des deux fenêtres, désaxées par rapport aux travées ( réutilisation et agrandissement de fenêtres antérieures ? ).
         Par ailleurs, le côté sud ne présente aucune ouverture, ce qui laisse à penser que le percement de baies, lors de la construction de la nef primitive, était impossible. Peut-être à cause de la présence de la chapelle sud du 12 ème et de son clocher ?
          Décor et mobilier :
Les culots de la nef sont mutilés lors de la révolution.
Une chaire à prêcher( 18 ème ) : décor sculpté taillé dans la masse

 

2. LE CHŒUR (B)  15 ème
          Il est voûté d’ogives lors de l’agrandissement de l’église et comporte une travée droite prolongée par une abside à trois pans coupés.
          Décor et mobilier :
La décoration du chœur est refaite en grande partie à la fin du 18 ème.
Les verrières, seconde moitié du 19 ème :
- à gauche, la scène de l’annonciation, à gauche l’ange Gabriel, à droite, la Vierge Marie
- au centre, à gauche , l’apôtre Pierre et à droite, Paul
- à droite, la visitation,à gauche, la Vierge Marie rendant visite à sa cousine Elisabeth.
Les peintures murales, 19 ème :
De gauche à droite : l’ange de l’Annonciation en plein vol, Saint Pierre et Saint Paul, la Vierge de l’Annonciation.
La dalle funéraire en marbre gris, à droite, contient la sépulture de Guillaume de Salies-Lème, seigneur de Sadirac, mort en 1736.

 

3.   COTE SUD, LA SACRISTIE (C)  12 ème
          Considérée comme rajoutée à l’église au 12 ème, sa forme particulière, semblable à une petite église, et sa situation en dessous du niveau de la nef principale, ont suscité bien des hypothèses : chapelle primitive autonome surmontée d’un clocher-tour, sur laquelle se serait greffée la nef principale ; ou au contraire, extension de la nef principale prévue pour servir d’assise à un clocher ?
          La courte nef, prolongée d’un chevet rétréci avec abside, sa voûte en cul de four et son appareil soigné en pierres de taille, attestent sa construction romane. L’abside ne comporte que deux baies au lieu de trois. Sur le mur du fond, un arc doubleau en plein cintre, pourrait indiquer l’existence d’un ancien passage au fond de la nef et un prolongement vers l’ouest.
Les interrogations sont, aussi , vives, concernant sa destination. La présence d’un sarcophage en marbre gris situé derrière l’autel, associé à la présence de reliques, peut induire un ancien lieu de pèlerinage, curatif ou prophylactique. Scellé dans le mur et derrière l’autel, il était encore l’objet, au début du 20 ème de pratiques magiques, par frottement des ossements qu’il contenait et accessibles par une cassure située derrière l’autel.
          On peut envisager, comme sur d’autres sites gallo-romains, une occupation ininterrompue d’une partie de la villa gallo-romaine, avec à l’origine, la présence d’un mausolée antique. L’utilisation de cet édifice comme chapelle funéraire à l’époque mérovingienne, expliquerait la présence du sarcophage en bâtière (7ème, 8 ème ). Le sarcophage et les petites dimensions de l’édifice tendent à confirmer l’existence d’un sanctuaire funéraire antique ou préroman, remanié au 12 ème.

  Décor et mobilier :

  1. l’autel : il comporte une table monolithe rectangulaire taillée en cuvette,
  2. le décor sculpté : à droite de la porte, un chrisme renversé lors de son remploi et inversé ( monogramme du christ fait des lettres X et P entrelacées, accompagné des lettres alpha et oméga) ; la lettre P est tracée à l’envers et les positions alpha et oméga sont inversées,
  3. sur les murs, marques de tâcherons
  4. le meuble de sacristie : constitué de deux corps ; partie supérieure en noyer ( première moitié du 18 ème ) et partie basse en chêne ou châtaignier ( 19 ème ).

COTE SUD LA CHAPELLE SAINT AUGUSTIN (D)   vers 1500


          Le niveau du sol , également inférieur à celui de la nef centrale, pose la question d’une continuité entre cette chapelle et la  sacristie, avec peut-être, à cet emplacement, la présence d’un ancien narthex ? Cette hypothèse est confortée par la présence inhabituelle d’une porte sur la face sud de la chapelle, laissant supposer l’existence d’une porte antérieure,peut-être la porte d’entrée de l’église primitive donnant accès au narthex ( ornée d’un tympan avec chrisme et de chapiteaux ? ).
Le voûtement en briques de la chapelle identique à celui de la nef comporte des clés de voûte avec des armes inscrites dans un large motif polylobé.

Décor et mobilier

  • les armoiries se présentent sous la forme d’un blason ecartelé en quatre parties ; sur deux parties opposées , deux croix tréflées, un rameau végétal en opposition avec deux pals
  • le décor sculpté des culots :
  •      côté est : au nord, un dragon à la queue enroulée ; au sud, une chauve-souris
  •      côté ouest : au nord, une tête d’homme ; au sud, un dragon positionné à l’endroit.
Eglise de Taron
Assomption de la Bienheureuse Vierge Marie
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